samedi 16 janvier 2016

Marineland, un archaïsme en cours d'effritement

« le futur appartient à ceux qui voient les possibilités avant qu’elles ne deviennent évidentes »
Michael E. Lewitt.

L'article de Nice-Matin du 15 janvier 2016 se terminait sur ce propos du Directeur Animalier de Marineland Jon Kershaw :
« Même si ce n'est pas lié se défend Jon Kershaw.
Exit le côté « bling bling » du bassin des orques.
Il devrait laisser-place à un programme plus « pédagogique ».
Davantage d'informations seront communiquées avec la nomination d'un nouveau directeur dans les prochains jours ».

Monsieur Kershaw et les intérêts qui l'emploient s'adressent exclusivement aux mentalités du XIXe siècle… or les gens de ce temps avaient pour eux l’excuse d'être peu ou mal informés des réalités complexes du monde.
Cette perception de notre monde est en pleine mutation, et après tout, il n'est pas si loin le temps où « Tintin au Congo » tirait sur tout ce qui bouge dans ses colonies africaines, sans que cela ne choque quiconque.


La seule motivation du Parc est de maintenir coûte un modèle économique qui a pour seule justification le profit et la croissance, si possible à deux chiffres.
Ces raisons strictement commerciales sont saupoudrées d'un vague argument sur la Préservation des Espèces qui ne résiste pas à un examen sérieux et dont l'alibi a pour fonction de faire passer la pilule au naïfs… qui le sont de moins en moins.

La « gestion de crise » n'est guère subtile, qu'il s'agisse de l'ancien Directeur Bernard Giampaolo (promu au loin à la suite du désastre naturel), et sa saillie sur la « casse animale » ou ici avec ce déni de réalité tristement pathétique.

La compréhension « pédagogique » des mammifères marins dans un univers carcéral dédié au spectacle est un non sens.
Prétendre ceci pour n'importe quel animal est d'ailleurs une absurdité et le progrès et les prouesses des reportages animaliers actuels (1) ne cessent de nous démontrer la complexité et la richesse des interactions de n'importe quel être vivant avec son milieu naturel, ou encore nous révèlent une « autre intelligence » qui nous échappe largement (et particulièrement pour les animaux vivant dans les océans).

Ainsi, l'exemple du prodigieux documentaire animalier « L'odyssée nocturne des éléphants », vient nous faire toucher du doigt la grossièreté et l'indigence des prétentions cyniques à l'éducation des masses du Marineland d'Antibes.
Ailleurs comme avec Kalaweit, des vocations individuelles formidablement déterminées nous aident à sortir de notre aveuglement « d'espèce élue »par elle même pour s'autoriser l'asservissement, l'exploitation, la torture et la destruction de toutes les autres.
Marineland, comme les cirques « avec animaux » sont confrontés au défi de l'évolution des mentalités et ose pourtant tout exploiter des ficelles du marketing pour enrayer l'inévitable.



Un cirque « sans animaux » a pourtant montré le chemin avec une immense créativité structurée sur une véritable réflexion éthique qui est résumée dans ce credo :  
« Le Cirque du Soleil se distingue par le message de chacun de ses spectacles.
Ce n’est pas du divertissement; c’est un message au sujet de la vie et de ce qui la rendrait plus juste.
L’humanité, voilà le trait distinctif du Cirque du Soleil.»
Et le succès public est planétaire.


La « pédagogie » selon les tenanciers/hôteliers de Marineland rapportée à notre époque et à ses dérives auto-destructrices ne pourra être que de cette nature tragique…


… et de même que nous ici, nos descendants visionneront incrédules les shows blin-bling (… ou pas) des Parc Marins, d'êtres vivants et conscients d'eux-mêmes conditionnés à des pitreries contre-nature, symboles affligeants de la représentation primitive et insensible que nous nous faisions de notre relation à la nature et au « vivant ».

Ils regarderont nos derniers zoos marins comme nous regardons aujourd'hui la réalité des zoo humains légitimant le colonialisme comme l'esclavagisme et qu'ils visitaient en famille, laissant laver leur cerveau en toute bonne conscience.

Nous sommes l'espèce auto-proclamée dominante et notre capacité de nuisance sur les co-locataires de cette planète le confirme chaque jour un peu plus.

La Direction du Parc fait semblant de ne pas comprendre les signaux pourtant assourdissants.

Cette volonté soudaine de recalibrage du parc n'a rien de spontanée et n'est qu'une pâle tentative irréaliste de contre-feu à la gigantesque insurrection menée (en occident du moins) contre ce Business trivial par les réseaux sociaux, les sites internet, les blogs, les manifestations, etc.

Tout aménagement cosmétique est radicalement vain et hors-sujet… confronté à un mouvement mondial et irréversible d'éveil des consciences concernant les Parcs Marins qui a été initié par le film « Blackfish » et ne cesse de s'amplifier (Sur ARTE au printemps 2015).


Comme la cerise sur le gâteau, on n'oubliera pas d'ajouter bien sûr, à ces questions de fond de nos responsabilités de « dominants » sur la Condition Animale, la longue liste locale de casseroles juridiques diverses et variées pointées dans ce blog et que traîne spécifiquement ce parc des Alpes-Maritimes.


Mise à jour du 27 juin 2016



•••••••••
Qui es-tu ? dit le petit prince. Tu es bien joli…
— Je suis un renard, dit le renard.
— Viens jouer avec moi, lui proposa le petit prince. Je suis tellement triste…
— Je ne puis pas jouer avec toi, dit le renard. Je ne suis pas apprivoisé.
« Ah ! pardon », fit le petit prince.
Mais après réflexion, il ajouta :
« Qu’est-ce que signifie « apprivoiser » ?
— Tu n’es pas d’ici, dit le renard, que cherches-tu ?
— Je cherche les hommes, dit le petit prince. Qu’est-ce que signifie « apprivoiser » ?
— Les hommes, dit le renard, ils ont des fusils et ils chassent. C’est bien gênant ! Ils élèvent aussi des poules. C’est leur seul intérêt. Tu cherches des poules ?
— Non, dit le petit prince. Je cherche des amis. Qu’est-ce que signifie « apprivoiser » ?
— C’est une chose trop oubliée, dit le renard. Ça signifie « Créer des liens… »
— Créer des liens ?
— Bien sûr, dit le renard. Tu n’es encore pour moi qu’un petit garçon tout semblable à cent mille petits garçons. Et je n’ai pas besoin de toi. Et tu n’a pas besoin de moi non plus. Je ne suis pour toi qu’un renard semblable à cent mille renards. Mais, si tu m’apprivoises, nous aurons besoin l’un de l’autre. Tu seras pour moi unique au monde. Je serai pour toi unique au monde…
Saint Exupery




Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire